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Bien que travaillant à une période de la France où les jeunes artistes cherchent à défier les traditions, Charles Chaplin reste redevable à la tradition du XVIIIe siècle des belles femmes dans le boudoir, comme celle de François Boucher et d'Antoine Watteau. Chaplin devient un artiste recherché par l'élégance de ses représentations et son recours aux styles du passé, qui font leur retour sous le Second Empire et la Troisième République. En fait, on peut considérer que Chaplin a contribué au regain d'intérêt pour le XVIIIe siècle, une tradition dont les écrits et les théories d'Edmond et de Jules de Goncourt, entre autres, ont été le fer de lance.

Charles Chaplin est né d'un père anglais et d'une mère française le 8 juin 1825 à Audelys, dans l'Eure. Bien qu'il ait conservé sa citoyenneté britannique jusqu'à cinq ans avant sa mort, son allégeance était claire lorsqu'il a écrit "Je suis français, tout français". Il commence à fréquenter l'école au collège de Lisieux où son professeur, également conservateur d'un musée local, remarque son flair artistique. Pour cultiver ce talent, sa mère emmène Charles à Paris et l'inscrit dans l'atelier de Michel-Martin Drolling, un peintre qui a étudié auprès de Jacques-Louis David, où il passe quatre ans. À l'âge de dix-huit ans, il est accepté à l'École des Beaux-Arts, où il peut poursuivre ses études artistiques.

Ses premiers travaux se concentrent sur les portraits et les paysages, dont beaucoup proviennent de la région d'Auvergne, où le mode de vie traditionnel des paysans est resté. La représentation de la vie quotidienne de la paysannerie était un sujet courant à l'époque et se retrouve dans d'autres œuvres d'artistes tels que Jean-François Millet et Jules Breton. Ses premières aquarelles datent de 1848 avec Saint Sébastien (d'après son tableau présenté au Salon de 1847), La Tricoteuse et un ensemble de quatre pièces de La Fileuse, où chaque femme est représentée dans un environnement différent, peut-être en accord symbolique avec les périodes de l'année. Ces premières œuvres montrent que Chaplin expérimente le réalisme, sans l'idéalisation et la frivolité qui caractériseront ses œuvres ultérieures.

Ses paysages et ses scènes paysannes n'occupèrent pas longtemps Chaplin, et il se tourna bientôt vers le portrait et la représentation de l'élégante, probablement pour tirer profit du marché croissant, sous le Second Empire, de ces types qui se glorifient et s'évadent. Il débute au Salon de 1845 avec Portrait de Femme et présente également plusieurs portraits au Salon de 1847, exposant les portraits de Mme C...., M. Ernest P...., M. Georges de S... (aucune autre information n'est fournie sur les modèles), ainsi que son Saint Sébastien Percé de Flèches. Avec le portrait de sa sœur présenté en 1851, pour lequel il reçoit une médaille de troisième classe, Chaplin rompt nettement avec ses travaux antérieurs. Cette mise à jour du style est clairement reconnue favorablement par les critiques et son statut augmente l'année suivante après avoir obtenu une médaille de deuxième classe. Tout en développant ce nouveau sujet, il commence à intégrer des scènes mythologiques dans son travail, comme en témoigne un certain nombre d'œuvres qu'il expose au Salon, telles que Diane (Diana-1859), Diane Endormie (Diana Sleeping-1863), et La Naissance de Venus -1867 Exposition Universelle, entre autres. Son succès ne cesse de croître et, en 1865, il est honoré du titre de Chevalier de la Légion d'Honneur.

Ses intérêts s'orientent de plus en plus vers la représentation de belles femmes, sujet pour lequel l'artiste est le plus connu.
Le travail de Chaplin a été loué dans plusieurs revues.
Son appréciation et sa capacité à dépeindre la "grâce et l'élégance" qu'il admirait tant ont fait de lui un portraitiste très recherché. Financièrement, un tel style de peinture apportait de grandes récompenses, ouvrant la voie à des commandes très bien rémunérées pour représenter les épouses et les filles de l'armée croissante de la bourgeoisie nouvellement riche et anoblie. Ses portraits et ses images de femmes vous captivent, ils vous séduisent. Chaplin a renouvelé, mais avec moins d'artifice, les délicatesses de Boucher ; il a la même touche brillante ; le même esprit et le même sourire. Les portraits de femmes toujours illuminés de couleurs charmantes, toujours idéalisés dans un décor d'allégorie mythologique et de nuages de roses.

Chaplin est sollicité pour décorer le "Salon de Fleurs" du Palais des Tuileries et en 1862, l'impératrice Eugénie fait directement appel à lui pour peindre sa salle de bains avec des scènes mythologiques. Le prince russe Demidoff lui commande des œuvres décoratives pour sa résidence. On lui demande également une œuvre pour le Théâtre Français, auquel il envoie un portrait de l'actrice Mademoiselle de Seyne. Chacune de ces commandes montre que son style était populaire dans les hautes sphères de la société politique et sociale française.

Après avoir pleinement établi sa carrière et sa popularité, Chaplin a ouvert son propre atelier où il a pris la décision inhabituelle de n'accepter que des étudiantes, car il était rare que les femmes soient autorisées à peindre. L'une de ses élèves les plus célèbres fut Mary Cassatt, une peintre impressionniste américaine, et Henriette Browne (en réalité Sophie Desaux) qui exposa dans de nombreux Salons aux côtés de Chaplin, et qui devint l'un des meilleurs peintres de genre et de natures mortes de sa génération.

Sa santé commence à décliner dans les années 1880, mais il continue à peindre jusqu'à sa dernière exposition au Salon en 1890. Il meurt à Paris le 20 janvier 1891. L'œuvre de Chaplin est caractéristique d'un style de peinture très apprécié des aristocrates et des membres de la royauté en France, en raison de son association avec les œuvres du XVIIIe siècle.